Distribution de Cookie libre ... tant que c'est encore possible
Paris, le 28 août 2000. Communiqué de presse, pour diffusion immédiate
À l'occasion du lancement officiel d'Amazon France, lors d'une soirée mardi 29 août 2000 à partir de 20 h 30 sur les quais de Seine devant la Bibliothèque Nationale de France, nous appelons à une distribution libre de cookies, accompagnés d'un dossier sur les brevets. Nous sensibiliserons ainsi, de façon humoristique, les invités d'Amazon au danger du brevetage des logiciels. Bon appétit donc, tant que c'est encore possible.
Pour rappel, la société Amazon a obtenu un brevet aux États-Unis (5.960.411) portant sur un procédé à mi-chemin entre logiciel et méthode intellectuelle. Il s'agit d'un brevet déposé sur un mécanisme clé du commerce électronique : le fait de stocker les coordonnées d'un utilisateur d'Internet dans un 'cookie' afin de lui éviter de saisir son nom et son adresse à chaque commande. Ce brevet porte donc à la fois sur une pratique commerciale (le fait de se souvenir des coordonnées de ses clients) et sur un procédé technique (le fait de stocker des informations personnelles dans un cookie). Amazon a donc obtenu un brevet sur la combinaison d'une pratique commerciale connue et d'un procédé informatique connu, puisque le procédé informatique des cookies a été inventé par Netscape et non par Amazon.
Le problème dans cette affaire est qu'Amazon entrave aux États-Unis le développement commercial de ses concurrents en utilisant un dépôt de brevet sur un procédé quasi-évident et pour lequel son effort d'innovation semble bien faible.
Amazon n'est pas seul responsable de cette situation. L'Office américain des brevets est tout aussi responsable dans la mesure où il a modifié depuis 1996 ses règles d'examen en matière de brevets afin d'autoriser des demandes évidentes dans le domaine du logiciel ainsi que des demandes portant sur des méthodes intellectuelles (vente, conseil, organisation, éducation, etc.). Cette pratique est aujourd'hui décriée aux États-Unis et contestée dans son utilité par un nombre croissant d'économistes, car elle menace l'innovation. Et le fait que de grands acteurs puissent breveter des schémas d'organisation ou de commerce devient un frein au développement du commerce électronique dans les PME.
L'Europe pourrait se croire à l'abri de tels effets car la Convention de Munich prescrit la non brevetabilité des logiciels et des méthodes intellectuelles. Malheureusement, sous la pression commerciale des États-Unis, cette situation inquiétante pourrait y voir le jour prochainement. En effet, la Commission Européenne, et notamment la Direction générale du marché intérieur dirigée par John Mogg, persiste dans ses plans pour légaliser en Europe les brevets logiciels, sur la base de partis pris purement idéologiques, et au mépris des avertissements lancés par plusieurs centaines d'entrepreneurs européens du secteur du logiciel et plus de 34 000 professionnels de l'informatique (recensés sur http://petition.eurolinux.org/).
En outre, les professionnels européens du brevet, et notamment la direction de l'Office européen des brevets, (OEB) semblent n'avoir pour seul objectif qu'une augmentation de leurs revenus en faisant reculer toujours plus loin les limites de la brevetabilité par des interprétations du droit à la fois excessives et contraires à la volonté du législateur. L'Office européen des brevets (OEB) accorde ainsi des brevets sur le fait de 'conserver dans un cahier unique tous les événements de gestion d'une entreprise' ou sur le fait de 'conserver dans un fichier une liste de sites Web interdits à la consultation', en contradiction avec les textes. Il n'est donc pas impossible que le brevet d'Amazon, déposé en Europe sous la référence EP927945, soit accordé par l'OEB au mépris du droit et qu'Amazon attende une révision du droit européen pour pouvoir utiliser son brevet contre les sociétés de la nouvelle économie européenne.
Peu d'acteurs politiques français se sont exprimés sur la question du brevetage des logiciels, ce qui prouve que le débat de fond nécessaire à une décision de cette ampleur n'a jamais eu lieu. En revanche, des parlementaires français et européens d'horizons politiques différents se sont exprimés sur ce sujet et se sont accordés sur le fait qu'une légalisation des brevets logiciels en Europe ne pouvait avoir lieu sans une étude d'impact économique et sans un débat. De telles études n'ont toujours pas été publiées.
Les festivités ayant lieu quai François Mauriac, nous leur rappellerons cette citation de l'écrivain :
« La sinistre partie se poursuit par la faute de ceux qui tiennent les cartes ? Mais qui donc les leur a mises entre les mains, sinon la nation elle-même condamnée à suivre une politique : celle dont précisément elle avait cru se garder par les choix qu'elle a faits ? » [Bloc-Notes, 27 juillet 1956]
Rendez-vous
Devant la Bibliothèque Nationale de France
mardi 29 août à 20 h 00
Quai François Mauriac
75013 Paris
Accès :
Métro ligne 6 (station Quai de la Gare)
Métro ligne 14 (station Bibliothèque-François-Mitterrand)
Bus : ligne 62, arrêt Pont de Tolbiac-Quai François Mauriac
Bus : ligne 89, arrêt François Mauriac ou Bibliothèque Nationale de France
Références
http://www.delphion.com/details?&pn=US05960411__
http://www.delphion.com/details?pn=EP00927945A3
http://petition.eurolinux.org/reference
http://www.gnu.org/philosophy/amazon.fr.html
'http://www.april.org/actions/brevets/amazon-dossier.html
APRIL
L'APRIL, Association pour la Promotion et la Recherche en Informatique Libre, créée en 1996, est composée de professionnels de différentes sociétés ou administrations, de chercheurs et d'étudiants. Elle a pour objectif de sensibiliser les entreprises, les administrations et les particuliers sur les risques des solutions propriétaires et fermées, et de les informer des potentialités offertes par les logiciels libres et les solutions basées sur des standards ouverts.
Pour plus d'informations, vous pouvez vous rendre sur le site Web à l'adresse suivante : http://www.april.org/
Contact Presse :
Frédéric Couchet, Président. E-mail : fcouchet@april.org.
Tél : 06.60.68.89.31
Pascal Desroche. E-mail : pdesroche@april.org.
Tél : 02.97.29.00.44