Vente liée : Chatel l'opportuniste
Paris, le 16 juin 2008. Communiqué de presse.
Le Secrétaire d'État à la Consommation, Luc Chatel, s'est de nouveau parjuré. Pour la troisième fois depuis sa prise de fonctions au gouvernement Fillon, il a nié le problème de la vente liée, dont il s'était pourtant préoccupé alors qu'il était député. L'April dénonce l'imposture.
La vente liée des ordinateurs et des logiciels préinstallés n'est pas un problème nouveau. Et malgré l'émergence de nouvelles offres, tel l'Eee-PC d'Asus livré avec un système GNU/Linux, le problème reste entier : il n'est toujours pas possible d'acheter un ordinateur sans acheter en même temps les logiciels préinstallés, ni de connaître le prix desdits logiciels ou encore leurs licences d'utilisation.[1] Ces pratiques constituent des infractions au code de la consommation. Luc Chatel, député, s'en était inquiété [2]; Chatel Luc, Secrétaire d'État à la consommation, ne s'en soucie pas.
Après ses propos lors des débats sur le projet de loi Consommation en novembre 2007 [3], puis la réponse à la question écrite du député socialiste Philippe Tourtelier [4], Luc Chatel récidive à l'occasion de la loi de modernisation de l'économie (LME). Mais cette fois il ne se contente pas de nier que la vente liée des ordinateurs et des logiciels préinstallés pose un problème. Il a rejeté un amendement de Christian Paul et des députés SRC [5], prétextant que la vente liée était déjà prohibée par le code de la consommation. [6]
Or cet amendement visait à préciser la loi en imposant un affichage individualisé des prix des éléments d'une même offre. « L'affichage des prix fait partie des obligations du vendeur.[7] Mais dans le cas des ordinateurs, on ne sait jamais combien coûtent logiciels. La plupart des consommateurs pensent que le système d'exploitation Microsoft Windows, qu'on les force à acheter avec tout nouvel ordinateur, est gratuit. Or la version la moins chère coûte une centaine d'euros, » explique Frédéric Couchet, délégué général de l'April.
« En rejetant cet amendement, Luc Chatel dénie au consommateur le droit de connaître le prix de ce qu'il achète, » déclare Alix Cazenave, chargée de mission à l'April. « Pourtant, c'est le coeur même de la question écrite qu'il avait posée lorsqu'il était député. Il abandonne le dossier de la vente liée comme celui l'action de groupe. À croire qu'il a changé d'idées en changeant de fonction. »
L'April est consternée par cette prise de position qui n'augure rien de bon. L'association de promotion et de défense du Logiciel Libre prépare, avec l'AFUL [8] et le groupe Racketiciel [9], une réunion convoquée par la Direction Générale de la Consommation, de la Concurrence et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) le 3 juillet 2008. Or la DGCCRF est sous la tutelle de Luc Chatel, qui considère que la vente liée n'est pas un problème. « Nous saisirons pleinement l'occasion d'avoir un dialogue constructif avec les professionnels ; mais tout cela ressemble à une opération de diversion, » conclut Jérémy Monnet, administrateur de l'April.
Références
- Communiqué April du 6 mars 2008 : Logiciels Libres dans les offres grand public : entre espoir et lassitude
- Question écrite N°60590 (publiée au JO le 15/03/2005) de M. Chatel Luc (Union pour un Mouvement Populaire - Haute-Marne)
- Le Secrétaire d'État Luc Chatel feint d'ignorer la vente liée
- Question écrite n°9339 (publiée au JO le 06/11/2007) de M. Tourtelier Philippe (Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Ille-et-Vilaine)
- Amendement n°999 de M. Christian Paul et les membres du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche
- « M. Luc Chatel, secrétaire d'État - L'article L. 122-1 du code de la consommation prohibe la vente liée de deux produits ou services dès lors qu'il n'est pas possible de les acquérir séparément sur le même lieu de vente. La jurisprudence a parallèlement validé la pratique de la vente liée d'un ordinateur et d'un système d'exploitation pré-installé, considérant que disposer d'un appareil prêt à l'emploi était un avantage pour le consommateur. Il n'est donc pas utile de modifier cet article du code. » - Extrait du compte-rendu analytique des débats du 11 juin (2ème séance) à l'Assemblée nationale
- Article L.113-3 du code de la consommation : « Tout vendeur de produit ou tout prestataire de services doit, par voie de marquage, d'étiquetage, d'affichage ou par tout autre procédé approprié, informer le consommateur sur les prix, les limitations éventuelles de la responsabilité contractuelle et les conditions particulières de la vente, selon des modalités fixées par arrêtés du ministre chargé de l'économie, après consultation du Conseil national de la consommation. (...) »
- Association Francophone des Utilisateurs de Linux et des Logiciels Libres
- Groupe de travail Racketiciel contre la vente liée
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Frédéric Couchet, délégué général, fcouchet@april.org +33 6 60 68 89 31