Mise à jour le 9 avril 2025 : les trois amendements ont malheureusement été déclarés irrecevable au titre de l'article 45 de la constitution de 1958 [4]. Ce qu'on appelle un « cavalier législatif », c'est-à-dire sans lien, même indirect, avec le projet de loi discuté
La loi de finance pour 2025, promulguée le 14 février 2025, avait supprimé la faculté pour les éditeurs et intégrateurs de logiciels de caisse d'attester eux-mêmes de la conformité de leur solution. Des amendements au projet de loi « de simplification de la vie économique » [5] proposent de rétablir le modèle de l'attestation. L'April appelle à l'adoption de ces amendements salutaires.
L'article 43 de la loi de finance pour 2025 [6] a supprimé du code général des impôts, la possibilité pour les « éditeurs », d'attester eux-mêmes de la conformité de leur solution de caisse. Au seul profit donc de la certification, une procédure lourde et très mal adaptée à la réalité des marchés informatiques et à l'innovation, en particulier pour les logiciels libres.
Dans un communiqué du 5 novembre 2024 [7], puis dans une lettre ouverte du 27 novembre [8], l'April avait alerté sur les risques importants d'une telle réforme.
Trois amendements au projet de loi « de simplification de la vie économique » ont été déposés à l'Assemblée nationale pour rétablir le modèle de l'attestation. Il s'agit des amendements 1170 [9], 2005 [10] et 2322 [11] 1. Les débats sur le texte reprendront à partir de ce mardi 8 avril à l'Assemblée, après une première lecture au Sénat en octobre 2024. L'April appelle l'ensemble de la députation à soutenir et adopter ces amendements.
Les amendements mettent utilement l'accent sur la complexité de la procédure de certification et son coût important, tout en soulignant que rien n'indique que les logiciels attestés par les éditeurs eux-mêmes présentent un plus grand risque de fraude ni, d'ailleurs, que la certification constitue « une garantie absolue contre les pratiques frauduleuses. ». D’ailleurs, l’administration fiscale, que nous avons rencontrée dans le cadre de son travail de mise à jour du bulletin officiel des finances publiques, ne remontait aucune alerte vis à vis du système en place avec l’auto-attestation.
Notons que lors des débats au Sénat, le ministre des Comptes publics alors en exercice, Laurent Saint-Martin, avait exprimé l'avis défavorable du gouvernement2. Il avait notamment interrogé les chiffres de la fraude mis en avant, évoqué la lourdeur du processus pour les petites entreprises et rappelé que la certification n'était pas une garantie contre la fraude. Il avait enfin souligné qu'il s'agissait « d'un des chantiers les plus pertinents à creuser » et qu'il souhaitait y travailler avec les parlementaires et les « parties prenantes ». Espérons qu'Amélie de Montchalin, actuelle ministre chargée des Comptes publics, et son cabinet, se montrera sensible à ces questions et soutiendra ces amendements. En 2021, alors ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, elle avait porté le plan d'action logiciels libres et communs numériques du gouvernement Castex.
Rappelons, enfin, que l'auditabilité du code par des tiers est au cœur des modèles de développement des logiciels libres. Les logiciels libres sont des projets collectifs. L'ensemble de leurs contributeurs et contributrices, en particulier celles et ceux qui ont développé un modèle économique autour du logiciel, partagent un même intérêt : la pérennité du projet, notamment en termes de cybersécurité. Dans le même sens, cet intérêt partagé, commun, dans un projet ouvert, est une garantie très forte contre toute aventure individuelle visant à introduire des failles de sécurité ou des fonctionnalités frauduleuses.
- 1. À l'heure où ce texte est publié, ceux-ci sont encore « en traitement » et n'ont pas encore été déclarés recevables
- 2. Voir la vidéo des débats (4min10) [12] (source sur le site du Sénat [13])