Lutte contre l'obsolescence logicielle : début des débats sur le projet de loi économie circulaire au Sénat

Capture d'écran du livre blanc de Hop, chapitre sur l'obsolescence logicielle

Mise à jour le 17 septembre 2019 : l'ensemble des amendements a été rejeté en commission « développement durable ».

La commission développement durable du Sénat étudiera demain, mardi 17 septembre 2019, à 15 h 30 en première lecture le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire porté par Brune Poirson, Secrétaire d'État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire. Plusieurs amendements proposent des pistes intéressantes pour lutter contre l'obsolescence logicielle.

L'obsolescence, parfois programmée, correspond à la réduction de la durée de vie d'un bien, par exemple d'un matériel informatique. L'obsolescence peut avoir des sources diverses : une conception qui ne pense pas la durabilité ou alors dans le but de la réduire, des facteurs culturels incitant au renouvellement d'équipements pouvant encore fonctionner, etc. Pour les équipements embarquant un logiciel, de plus en plus nombreux avec les « objets connectés », l'obsolescence logicielle, dans toutes ses formes, peut être un facteur déterminant de leur durée de vie. Pourtant, cette considération est totalement absente du projet de loi initial présenté par le gouvernement. Plusieurs membres de la commission développement durable du Sénat ont proposé des amendements pour pallier ce défaut de conception. (Voir la liste complète des 514 amendements).

  • Les amendements similaires COM-86 (groupe communiste républicain citoyen et écologiste, CRCE), COM-346 (groupe socialiste et républicain, PS) et COM-398 (groupe La République En Marche, LREM) visent à lutter contre « toute technique, y compris logicielle, par laquelle un metteur sur le marché vise à rendre impossible la réparation ou le reconditionnement d’un appareil hors de ses circuits agréés est interdite ». Proposition d'amendement inspirée du livre blanc (fichier PDF) de l'association Halte obsolescence programmée (Hop), page 44.

  • L'amendement COM-87 (CRCE) reprend une autre proposition issue du livre blanc de Hop (page 34), également portée par greenIT.fr, visant à mieux informer « le consommateur de la période pendant laquelle les logiciels et systèmes d’exploitation indispensables à l'utilisation des biens sont disponibles sur le marché. » Il vise également à imposer au fabricant ou importateur de distinguer « les mises à jour correctives (corrigeant des dysfonctionnements et/ou failles de sécurité) et évolutives (modifiant ou ajoutant des fonctionnalités) », la personne qui acquiert le bien doit alors être en mesure de refuser ces « mises à jour évolutives ». La distinction entre ces deux catégories de mises à jour est importante, la surabondance de nouvelles fonctionnalités, sans cesse plus gourmandes en ressources, est déterminante pour la durée de vie des appareils.

  • L'amendement COM-372 (PS), propose de préciser la définition d'obsolescence programmée actuellement définie à l'article L. 441-2 du code de la consommation, introduite en 2015 par la loi pour la transition énergétique. L'amendement propose ainsi l'ajout d'un alinéa à l'article : « ces techniques peuvent notamment inclure l’introduction volontaire d’une défectuosité, d’une fragilité, d’un arrêt programmé ou prématuré, d’une limitation technique, d’une impossibilité de réparer ou d’une non compatibilité ». À noter que cette proposition avait été introduite, puis supprimée, lors de la navette parlementaire de la loi de 2015.

  • L'amendement COM-404 (LREM) demande la remise d'un rapport sur l'obsolescence logicielle : « Un rapport du Gouvernement est remis au Parlement au plus tard au 1er janvier 2022 sur la durée de vie des appareils numériques, l’obsolescence logicielle et ses impacts et les options pour allonger la durée de vie des équipements concernés. »

La question de l'obsolescence logicielle est très complexe et ne pourra, évidemment, être adressée par ce seul projet de loi. Lutte contre l'informatique déloyale (vente forcée, DRM, démarrage exclusif…), droit à l’interopérabilité et, plus globalement, défense effective des libertés informatiques sont des considérations qui ne peuvent être ignorées pour pleinement adresser l'enjeu en cause. Ces amendements permettent toutefois d'ouvrir le débat et proposent des solutions qui vont dans le bon sens ; ils doivent être soutenus.

Les discussions en commission seront diffusées en direct à partir de 15 h 30 sur le site du Sénat.

La suite des débats aura lieu en séance publique les 24, 25 et 26 septembre 2019. D'autres amendements seront certainement proposés pour lutter contre l'obsolescence logicielle. L'April ne manquera pas de les relayer et appellera toutes les personnes soucieuses d'une informatique plus libre et plus durable, à se mobiliser pour les soutenir.

L'émission Libre à vous ! de l'April du mardi 17 septembre abordera la question de l'obsolescence logicielle dans son sujet long. Les personnes invitées sont Frédéric Bordage de GreenIT.fr et Adèle Chasson de l' Hop. Diffusion entre 15 h 30 et 17 h sur Cause Commune, l'émission sera ensuite disponible en podcast.