La cour de Cassation s'intéresse à la vente liée
Le 15 novembre 2010, la cour de Cassation s'est prononcée1 sur la question de la vente liée, au regard des évolutions récentes de la jurisprudence européenne. Elle réaffirme la nécessité d'étudier précisément chaque demande, afin de sanctionner d'éventuelles pratiques anti-concurrentielles et/ou déloyales.
La Cour de cassation avait été saisie en 2009 par un consommateur qui souhaitait acquérir un ordinateur portable de marque Lenovo sans logiciel pré-installé. Il avait été débouté de sa demande par le tribunal de proximité de Tarascon, qui avait considéré « que l’accord des parties s’est fait sur un type d’ordinateur complet et prêt à l’emploi et que le consommateur avait, l’acquisition effectuée, la possibilité de se faire rembourser les marchandises dans leur globalité »2. Saisie, la cour de Cassation a annulé ce jugement en considérant que le juge de proximité « n'[avait] pas donné de base légale à sa décision ».
L'April considère que cette décision est essentielle, car elle permet de clarifier la situation suite aux évolutions récentes du droit. La Cour de Justice des Communautés Européennes avait en effet considéré dans un arrêt du 23 avril 20093 qu'une réglementation qui interdit la vente conjointe par principe n'était pas conforme au droit européen, hors circonstances spécifiques. Certains commentateurs avaient alors interprété cela comme une autorisation pure et simple de la vente liée. La cour de Cassation rétablit l'équilibre, en rappelant que le droit européen interdit les pratiques commerciales déloyales4, et que la vente liée n'est possible que dans la mesure où elle ne nuit pas à la concurrence.
De plus, la cour de Cassation pose pour principe que le juge doit examiner la présence éventuelle d'une pratique commerciale déloyale lorsqu'un tel cas lui est exposé, et donc étudier les conséquences de la vente liée sur le marché et sur la concurrence. Si cette décision concerne actuellement la forme et non le fond, l'April espère qu'elle donnera au juge de première instance les outils pour condamner la pratique déloyale qu'est la vente liée informatique.
Sur ce sujet voir également le communiqué de presse de l'Aful.
- 1. C. Cass., 1ère chambre civile, 15 novembre 2010, n° 995 disponible sur le site de la cour de Cassation .
- 2. Décision de la cour de Cassation disponible sur http://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/premiere_chambre_civile_568/995_15_18117.html.
- 3. CJCE, 23 avril 2009, C-261/07 et C 299/07, arrêt rendu sur renvoi préjudiciel.
- 4. Selon la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et l'article L120-1 du code de la Consommation, « Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère, ou est susceptible d'altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service ».