La Commission Européenne ouvre deux enquêtes pour vente liée et abus de position dominante
Lundi 26 juillet 2010, la Commission européenne a publié un communiqué annonçant qu'elle ouvrait deux enquêtes contre IBM, qu'elle soupçonne de vente liée et d'abus de position dominante.
Largement répandue en informatique, la vente liée consiste à conditionner l'achat d'un bien ou d'un service (du matériel informatique par exemple) à l'achat d'un autre bien ou service (par exemple un logiciel)1.
Avec cette procédure, La Commission européenne s'intéresse de près à ce problème qui favorise les abus de position dominante, entrave la concurrence et pénalise fortement le secteur du logiciel libre. Ces pratiques sont largement répandues tant sur les marchés professionnels que grand public : il est donc temps pour la Commission d'agir sur le sujet, face à l'inaction des autorités françaises.
Ces premières enquêtes visent les activités d'IBM sur le marché des serveurs centraux.
La première d'entre elles fait suite à une plainte des vendeurs de logiciels d'émulation T3 et Turbo Hercules, qui affirment qu'IBM conditionnerait la vente de son matériel à l'achat de son système d'exploitation pour les serveurs. La Commission souligne que « selon les plaignants, cette pratique aurait pour conséquence d'évincer du marché les fournisseurs de technologies d'émulation grâce auxquelles les utilisateurs pourraient exécuter des applications essentielles sur du matériel autre qu'IBM. »
La seconde enquête concerne des pratiques anticoncurrentielles présumées, qui auraient pour but de « verrouiller le marché des services de maintenance (en évinçant ses concurrents potentiels du marché), notamment en restreignant ou en retardant l'accès aux pièces de rechange dont IBM est le seul fournisseur. ».
L'April se réjouit que la Commission se penche sur ces pratiques anticoncurrentielles et monopolistiques et espère qu'elle ne se limitera pas au marché professionnel de l'informatique. Ces entraves au libre choix du consommateur concernent en effet tout autant le marché grand public par la vente liée quasi-systématique du système d'exploitation Microsoft Windows avec un ordinateur neuf, contre laquelle aucune action publique n'a encore été menée malgré son illégalité et la mobilisation très importante à ce sujet.
La Commission Européenne avait déjà fait un premier pas en condamnant Microsoft pour avoir lié son lecteur multimédia Windows Media Player à son système d'exploitation Windows, puis en enquêtant sur la vente liée de son navigateur Internet Explorer à ce même système d'exploitation. Cette enquête sur la vente forcée liant matériel et logiciel est donc une nouvelle étape, qui devra conduire la Commission à trancher clairement en faveur de la liberté de tous de choisir son matériel et ses logiciels.
Si ce premier pas est positif, la Commission doit poursuivre cet effort en interdisant les ventes forcées sur tous les marchés et d'abord celle, omniprésente, du système d'exploitation Windows de Microsoft parmi les revendeurs grand public. Seule une action sur l'ensemble des marchés pourra rétablir la concurrence et les droits des consommateurs, et garantira à chacun le libre choix de son matériel et de ses logiciels et l'essor des solutions logicielles libres pour tous.
- 1. Dans ce cas précis, l'achat de logiciel qui est subordonné à l'achat de matériel : pour obtenir le logiciel, il faut nécessairement acheter le matériel.